Les vieux
- tiens je vais faire une intro
- ah, réglement de comptes à OK Corral ?
- non, une colère légitime et profonde
- pitaing, c'est sérieux, alors !
- ouais j'ai un peu les boules
- faut prendre l'accent texan ?
- pas la peine.
J'ai eu il y a déjà quelques temps une longue conversation avec une amie. Elle me faisait
part de son désarroi professionnel. Elle a 20 ans d'expérience dans son
boulot. Elle a toujours réussi plutôt brillamment les missions qui lui
furent confiées. (quoi, un passé simple n'a jamais fait de mal à
personne). Tout bascule depuis que son entreprise a "évolué vers la
taille critique". De mariage en mariage, elle se retrouve dans une
multinationale. Les méthodes changent. Les outils changent. On lui
demande de s'adapter à des méthodes auxquelles elle n'adhère pas
spontanément. On lui fait comprendre que c'est ça ou la porte. On lui
demande de s'intégrer dans un mode de communication superficiel où la
quantité a plus d'importance que la qualité des informations échangées.
Elle promène difficilement une fin de quarantaine dérangeante dans un isolement dérangeant.
Que lui demande-t-on, en fait ?
Quel est le choix ?
S'adapter ? Renier sa personnalité et ses convictions ?
Les
outils, les NTIC (non, vous n'aurez pas votre note de bas de page) nous
font peur, à nous les quarantenaires. Heureusement que nous les
utilisons pour blogger, sinon, nous serions en effet complètement
inadaptés à ce mode de communication. Dans les relations
professionnelles, un mot peut être interprété comme insultant. Nous
n'avons jamais appris à utiliser le mot juste, lisse, aseptisé qui
convient dans les multinationales. Je me souviens d'avoir manqué le
renvoi pour l'utilisation du verbe "to insist" qui avait paraît-il un
caractère méprisant pour mes interlocuteurs américains. Dans le cas de
mon amie, il ne s'agit pas de cela. Il s'agit de répondre dans le bon
"tempo" (sorry, on dit "timing") avec des phrases plates ou des
informations pertinentes. Que sont des informations pertinentes aux
yeux des chefs ?
Comment faisons nous pour nous intégrer dans
des sociétés dirigées par des plus jeunes que nous, dont les
préoccupations sont bien plus personnelles (je parle de la carrière,
autrefois on disait l'avancement) que ce à quoi nous étions habitués.
Cela renvoie à la note sur la conférence à laquelle j'ai assisté (qui reste à écrire) : le capitalisme est-il moral ?
En
résumé, nous, quarantenaires, sommes peu préparés à ces changements.
Alors on nous menace de nous jeter comme une vieille cafetière dont un
fusible aurait sauté. Quel avenir ? Inventer son job ? C'est bien
souvent la seule possibilité. Mais je vous laisse imaginer la dose de
confiance en soi qu'il faut posséder pour cela. Et les risques de
déstabilisation de la personnalité.
- pfff, y fait chier ce matin
- ouais, c'est un vieux
- moi je vais voir un blog rigolo
- frivoli ?